Le repositionnement de la planification familiale passe par la sécurisation et la disponibilité des produits contraceptifs. Pour relever ce défi, le Bénin a, en 2021, pris au plan national entre autres, l’engagement de porter, à partir de 2022 et sur la base des 250 millions de francs CFA affectés en 2019, la part contributive de l’Etat à 403 millions FCFA en 2026 en augmentant de 10% chaque année le budget alloué par le gouvernement à l’achat des produits contraceptifs. Un an après, les lignes ont bougé et il urge pour l’Etat de maintenir le cap pour zéro décès en couche d’ici à 2030.
A 13 ans, Gado, élève en classe de 5e à Natitingou, découvre qu’elle était enceinte et abandonne les classes du fait de la stigmatisation. Son rêve précieux de devenir avocate a ainsi pris fin. Car, cette adolescente a été mariée précocement par ces parents à cause de la survenue de la grossesse. « Je n’ai pas eu la chance de prendre les dispositions nécessaires pour éviter la grossesse. Aujourd’hui cette grossesse que je ne voulais pas, me fait tourner dos à l’avenir alors que j’étais l’espoir de ma fille » lâche Gado en pleure. Pour le Directeur exécutif de l’Ong Grafed, M. Jérôme Chatigre « l’insuffisance ou le faible accès aux services de planification familiale de qualité et la rupture de stocks des produits de planification familiales contribuent significativement au taux élevé des grossesses non désirées chez les femmes notamment chez les adolescentes et jeunes ». Cette hypothèse est renforcée par les résultats de l’EDSB 2018 qui estiment les besoins non satisfaits en planification familiale à 32.3% avec un taux de prévalence contraceptive de 12,4% contre un objectif de 22% en 2020. Par ailleurs l’indice synthétique de fécondité est de 5,7 enfants par femme en âge de procréer et le taux de mortalité maternelle est estimé à 391 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes. Un tableau sombre qui inscrit le Bénin parmi les pays les plus faibles de la sous-région.
Priorité pour l’Etat de relever les défis financiers relatifs à la Pf
Pour renforcer les principes de l’accord de Ouagadougou et celui de Londres visant à promouvoir la Pf, le gouvernement a pris en 2021, au plan national entre autres, l’engagement d’augmenter de 10 % chaque année, à partir de 2022 et sur la base des 250 millions de francs CFA affectés en 2019, le budget alloué par le gouvernement à l’achat des produits contraceptifs pour porter la part contributive de l’Etat à 403 millions en 2026. « Aujourd’hui, les fruits ont tenu la promesse des fleurs, car la Direction de la santé de la mère et de l’enfant et des soins infirmiers et obstétricaux (Dsme-Sio) nous apprend que le gouvernement pour le compte de 2022 a déjà déboursé 300 millions de francs CFA pour l’achat des produits contraceptifs » déclare Jérôme Chatigre qui se réjouit de la disponibilité des produits SR sur le terrain. Si Dr Justine Houzanmè, Coordonnatrice nationale du Réseau des Ongs et associations de femmes contre la féminisation du VIH /Sida et les violences basées sur le genre au Bénin (Roafem) « salue la volonté politique du président Patrice Talon et de son gouvernement dans la réduction de la mortalité maternelle à travers le financement de la planification familiale, elle invite par contre ses pairs de la société civile à multiplier les actions de plaidoyer à l’endroit des décideurs afin d’aider à accroître considérablement le budget de l’Etat pour la Pf d’ici à 2026 ». C’était lors de l’atelier de lancement du projet « mobilisation de ressources gouvernementales pour l’accroissement et la sécurisation de l’approvisionnement en produit SR », suivi de la formation sur le plaidoyer SMART, organisé à Bohicon par le Groupe de recherche, d’action et de formation en épidémiologie et en développement (Grafed) grâce à l’appui financier du Reproductive Health Supplies Coalition (RHSC).Il urge donc pour l’ensemble des acteurs de développer des stratégies innovantes de veille citoyenne au profit de la mobilisation de ressources gouvernementales pour l’accroissement et la sécurisation de l’approvisionnement en produit SR. Rappelant que la rupture de stocks des produits de planification familiales a un impact sur la prévalence contraceptive et le choix des méthodes contraceptives des femmes notamment des adolescentes et jeunes, Jérôme Chatigre indique que « le financement continu et à temps de la pf va permettre de réduire le taux de rupture de stock de 78% en 2019 à 35% en 2026 à travers l’amélioration de la disponibilité des produits contraceptifs jusqu’au dernier kilomètre ».Il est donc clair que l’amélioration de l’utilisation de la contraception moderne passe par le respect des engagements financiers de la PF notamment l’achat des produits contraceptifs et leur mise à disposition à temps, la promouvoir d’une fécondité responsable, à travers un meilleur accès à l’information et aux services de la planification familiale et la sécurisation des produits SR. L’utilisation de la planification familiale devient alors urgente pour permettre aux femmes de ne plus mourir en voulant donner la vie, permettre aux individus de mieux gérer leur sexualité. Elle va également permettre aux couples de faire des enfants qu’ils désirent et qu’ils peuvent prendre en charge, mais surtout de mettre fin aux avortements clandestins et pratiqués dans de mauvaises conditions. Ceci dans le but de réduire la pauvreté et d’atteindre les ODD 4 liés à la santé.
Au regard de ces avantages, il urge pour l’Etat de poursuivre ses efforts financiers pour la sécurisation et la disponibilité des produits contraceptifs d’ici à 2026. Car dira Mme Prudencia Gbaguidi de l’Agence nationale pour les soins de santé primaires (Anssp), « la sécurisation et la disponibilité des produits contraceptifs va rehausser le taux de prévalence contraceptive et du coup le pays va enregistrer moins de décès de femmes et de filles en couche ». Le ministère de la santé à travers la Dsme-Sio est donc invité à augmenter les ressources internes pour financer la planification familiale et l’achat de produits contraceptifs. Aussi doit-il travailler à identifier les obstacles liés à la mobilisation de ressources domestiques pour l’achat de produits contraceptifs et proposer des solutions en vue d’accélérer les progrès en matière de planification familiale. Il est aussi important pour les parties prenantes de s’assurer que les services de contraception soient disponibles et accessibles, jusqu’au dernier kilomètre sur le territoire, et de donner aux familles la possibilité de faire le choix, et d’avoir le nombre d’enfants voulus au moment voulu. C’est à ce prix que le Bénin pourra réaliser sa vision d’être à l’horizon 2030 « un pays où la population en particulier les personnes vulnérables bénéficient d’un accès équitable aux services de Planification Familiale de qualité contribuant ainsi à son développement harmonieux ».
J.M.