Le Bo, élément cultuel des sociétés africaines, suscite à la fois méfiance, crainte et fascination. Symbole de puissance et d’amour, il envoie tantôt à des notions comme la magie, tantôt à la manipulation des connaissances du règne végétal et animal pour des objectifs bien précis . Considéré à la fois comme une pensée de vie, le Bo est un savoir endogène qu’on ne peut appréhender dans sa globalité et la complexité sans connaître ses variants ou composants comme le Bogbé, le Gbesisa, le Nudjidjrè, le Nudida ,le Nuvènu, le Nuyin et le Kpé

Le Bo est consubstantiel à la vie. Chacun a une idée de ce que c’est que le Bo sans pour autant lui donner une définition exacte. S’il est vrai que les travaux des ethnologues comme Paul Hazoumè et Bernard Mapoil, ont porté sur la notion du Bo, il convient de souligner que la plus grande publication académique sur le Bo, a été l’œuvre du professeur Apovo Cossi Jean Marie de l’Université Nationale du Bénin. Dans sa thèse de doctorat sur « L’Anthropologie du Bo : Théories et pratiques du gri-gri », soutenu en 1995 à l’Université de Nantes , l’auteur a fait une description complète du Bo et de sa cosmogonie pour enfin aboutir à la Boologie. Science ou discours sur le Bo.

Des origines à la pratique du BoRetour ligne automatique
Selon Jean Marie Apovo, le terme fon Bo, est une abréviation de l’expression yoruba ״Ebo aari fun, qui peut se traduire de diverses manières : faites qu’il ne connaisse pas la honte, couvre-le dans le sens d’une couverture matérielle et morale afin de cacher sa véritable nature aux autres. Il est recouvert en effet pour que l’utilisateur profane ne puisse pas en connaître la vraie composition ou sa nature. Retour ligne automatique
D’origine yoruba ״Ebo״ est devenu par suite de sa diffusion chez les fon, les Gun et les Mina dont les langues sont de la même famille, par déformation de la prononciation ״Bo״.
Dans la pure tradition Yoruba, ״Ebo״ est né de l’action de deux frères Aroni et Aronomandja. Le premier a cherché les feuilles d’un arbre et le second l’écorce et les racines. La combinaison de ces éléments a servi de médicament pour guérir un mal. Là, le médicament a le sens de Bo ou plus précisément le Bo a un sens thérapeutique et se rapproche de (ama) ״amansi״. Retour ligne automatique
Une autre version Yoruba rapporte que le Bo est parti d’un homme nommé Oruki, qui mit au monde trois enfants : Ekpè qui s’installe à Jébu, Acé qui occupa Egba, l’actuelle Abéokuta et Kpétu qui choisi Ifè. Grâce à cette version Ifè, Jébu et Egba sont demeurés très célèbres au Nigéria comme foyers de Bo. Retour ligne automatique
De cette version proviennent les trois sortes de Bo : Acè, Ekpe, Kpétu Kpétu. Retour ligne manuel

Acé sert à guérir et permet de réaliser tous ses vœux et souhaits, et partant donne la chance, le bonheur ; Retour ligne manuel

Ekpe au contraire sert à maudire, donne la maladie, le mal, le malheur, la mort ; Retour ligne manuel

Kpètu Kpétu sert aussi bien au mal qu’au bien. De là , découle la différence de leur usage et de la notice de leur emploi. Celui qui utilise Acè est capable d’obtenir tout ce qu’il recommande à quelqu’un, de se faire obéir sans hésitation. Retour ligne automatique
Selon le Professeur Apovo, le Bo a un sens caché, clandestin, sournois, subreptice. Le Bo est un fait confidentiel, à distribution restreinte et qui lui confère une allure ésotérique, occulte. En clair, le Bo est le canal, le vecteur par lequel se communique la puissance d’un individu, d’une ethnie, d’un clan ou d’une race. Retour ligne automatique
Dans la pratique, le Bo prend à la fois une valeur matérielle, artificielle, factice voire immatérielle et invisible.

L’aspect matériel du Bo
Le Bo fait parfois appel à ama. En langue fongbé, on dit : Bo ama wè nyi, c’est-à-dire : la feuille qui est Bo.Retour ligne automatique
Dans la pratique, on ajoute aux feuilles des éléments d’animaux, organes ou du sang pour renforcer leurs vertus. Retour ligne automatique
En effet, le pouvoir d’action de la feuille se manifeste eu égard à ses vertus lorsque les conditions sont réunies.Retour ligne automatique
C’est le même principe qui régit les amulettes ״les défifin״, les talismans, les ״tila״, qui sont souvent un ensemble de feuilles et d’autres ingrédients enveloppés dans un sachet en toile ou en cuir.Retour ligne automatique
Dans la cosmogonie du Bo, il y a aussi le ״nudida״. En général, c’est du cola pétri dans le sang d’un animal ou imbibé du sang d’un animal qu’on accompagne d’incantations pour obtenir l’effet souhaité. Retour ligne automatique
Comme on peut le constater, les plantes, graines, feuilles, fleurs, écorces, racines, et autres sont la source profonde et inépuisable du Bo. Il suffit de connaître les différentes matières et la manière de les agencer, pour avoir des résultats que des profanes vont juger spectaculaires, et extraordinaires.Retour ligne automatique
Pour le professeur Jean Marie Apovo , tant qu’il aura de la verdure, il y aura toujours du Bo. Retour ligne automatique
Outre le règne animal et végétale, on se sert parfois des pierres, des minerais, du sable, du calcaire pour fabriquer du Bo.Retour ligne automatique
La pulvérisation du calcaire, ״Houé״sert à fabriquer les ״Fafo״ avec des ״du״ du Fa et dont l’usage avec ou sans incantations accorde puissance, gloire et terreur. Par le truchement de la colonisation, d’autres éléments entrent dans la composition du Bo. On peut citer le miroir, la houe, ״Alin״, le bleu de lavage ״Fé״, le fer, ״Flélégan״, l’aluminium ״Agbalia״ fil d’acier, ״dabla״ , tissu servant de linceul, lame de fer, la poudre, du parfum, de la pommade.

Bo ; Amansi ; Bomansi
Dans l’univers du Bo , il y a des confusions à ne pas faire . S’il est vrai que le Bo est ״ama״ (feuille), il faut reconnaître qu’il y a une différence entre Bo et ״amansi״. L’amansi est l’équivalent du produit pharmaceutique. Retour ligne automatique
Le Bo sert parfois de ״amansi״ dans le sens d’antidote. Dans ce cas on parle de ״Bomansi״, contraction de Bo et de amansi dont les effets paraissent vraiment mystérieux. Dans ce cas, le Bo à ce moment traite le mal et guérit spectaculairement le malade. On parle de ״Bo-mansi״. Parfois lorsque le malade est à l’étranger, il est représente par une statuette, ״Botchio״, auquel on fait des scarifications, des vaccinations accompagnées d’incantations pour le guérir.

Bo et Nuvènu
Nuvènu est formé à partir de ״nu״, chose, ״Vè״, interdit, ne se fait pas, ne s’accorde pas ou demeure incompatible. Exemple : Djè vè gbin, l’escargot et le sel sont incompatibles, ils ne peuvent pas rester ensemble puisque lorsque l’escargot touche le sel, il meurt illico presto. Le sel, ״djè״ constitue pour l’escargot un ״Nuvènu״.
Le nuvènu peut donc se définir comme quelque chose qui s’accompagne d’une réaction inattendue, indésirable, non souhaitable, mais qui se produit nécessairement. La connaissance et la détention du ״Nuvènu״ ne nécessite pas un apprentissage particulier ni long, ni spécifique. Certains pensent que le ״nuvènu״ n’est pas un Bo.
Cependant, on peut dire que la combinaison des éléments du règne animal ou végétal pour une action instantanée est appelée ״nuvènu״ .Retour ligne automatique
Le ״Nuvènu״ est considéré comme un Bo très simple, dont les éléments constitutifs se ramènent en général à un seul objet très simple, une feuille, un caillou, un signe parfois qui ne râte jamais l’effet qu’on attend de lui. Sa réalisation n’est ni difficile ni coûteuse. C’est la forme élémentaire et première du Bo considéré dans sa composition et dans son efficience. Le ״Nuvènu״ rapproche du ״Kpé״.

La suite sur le Nudida, le Nunyi, le Nudjidjré et le Kpé dans nos prochaines parutions

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