Le troisième et dernier Débat spécial de haut niveau « Talking Africa-Europe » organisé par la Fondation Afrique-Europe sur la problématique l’accès aux vaccins et de l`autonomie sanitaire a eu lieu le 3 février. Plus d’un an après le lancement de la campagne mondiale de vaccination et deux semaines seulement avant le sommet UE-UA, la pandémie de COVID-19 continue d’avoir un impact considérable sur les systèmes de santé, les économies et la vie quotidienne des citoyens des deux continents.
Fin janvier 2021 2022, les cas cumulés de COVID-19 reportés pour 1 million d’habitants sont près de 25 fois plus élevés dans l’Union européenne (UE) qu’en Afrique. Mais l’impact du COVID-19 en Afrique est probablement largement sous-estimé : selon l’OMS, seule une infection à COVID-19 sur sept serait détectée en Afrique. S’agissant de la vaccination, seuls sept des 54 pays africains, contre 26 des 27 pays de l’UE, ont atteint l’objectif OMS d’avoir fin 2021 vaccine complètement au moins 40 % de leur population.
Dans ses déclarations liminaires, Jutta Urpilainen, Commissaire européenne chargée des partenariats internationaux, a rappelé la mantra selon lequel « s’agissant d’une pandémie, personne n’est en sécurité tant que tous ne le sont pas ». Résumant l’action de l’UE pour soutenir la lutte contre le COVID-19, elle a souligné que “l’UE a fourni 46 milliards d’euros pour aider 130 pays, dont 10 milliards sont allés à l’Afrique ». Elle a ensuite confié que “L’équité exige plus que des dons”, notant qu’”environ la moitié des vaccins ont jusqu’à présent atteint l’Afrique, et il reste essentiel de s’assurer qu’ils parviennent aux bras des gens”. Elle a néanmoins reconnu que tant que le taux de vaccination reste inférieur à 10% en Afrique, “cela constitue un échec de toute la communauté internationale , et nous n’avons pas fait assez ». Au-delà, la Commissaire a partagé la volonté européenne de mettre en place un partenariat de long terme pour renforcer les systèmes de santé africains et mettre en place une capacite autonome de production sanitaire, notamment en matière vaccinale. A court terme, l’UE continuera à « soutenir la réponse immédiate à la COVID-19, y compris le déploiement de vaccins, avec 100 millions d’euros destinés à soutenir la distribution de vaccins en Afrique ». À plus long terme, l’UE a d’ores et déjà initie un soutien à la production locale sur le continent africain, en particulier en matière de vaccins, à hauteur d’un milliard d’euros avec des projets en cours au Rwanda, au Sénégal, en Afrique du Sud et Ghana.
Matshidiso Moeti, Directrice Régionale de l’OMS pour l’Afrique, a indiqué que 11 millions d’Africains ont été infectés par le COVID-19 et un quart de million en sont morts, avec d’importantes disparités régionales. Elle a confirmé que l’impact du COVID-19 en Afrique pourrait être largement sous-estimé. Selon l’OMS, seule une infection sur sept serait détectée en Afrique. Au cours des premières phases de la pandémie, l’accès aux services liés au VIH, à la tuberculose et au planning familial, entre autres, a diminué.
La résilience, l’une des grandes leçons à tirer de cette pandémie
« Nous devons apprendre à investir en temps de paix. Une grande partie de ce qui se passe aujourd’hui se produit dans un contexte de crise », a-t-elle déclaré, exprimant l’espoir que d’ici la prochaine crise, l’Afrique sera dans une meilleure situation en termes d’accès et de résilience, avec des systèmes de santé plus solides. Tajudeen Raji, le chef de la Division des instituts et de la recherche en santé publique, Centre Africain de Contrôle et de Prévention des maladies (CDC Afrique), a notifié que la collaboration avec des partenaires, dont l’OMS, a été la clé de la réussite de l’Afrique en matière de vaccination. “Avant même que la première vaccination ne soit approuvée, nous savions que l’Afrique serait au bout de la file d’attente et qu’elle se répercuterait après que chacun ait pris sa part”, a-t-il affirmé. Raji a mentionné la récente réunion des chefs d’État de l’Union africaine qui a discuté d’un rapport couvrant des questions telles que la manière dont l’Afrique peut renforcer les situations sanitaires sur le continent, augmenter les ressources humaines et renforcer les capacités locales de fabrication de vaccins.
Pour Abebe Aemro Selassie, Directeur du département Afrique du FMI, a ‘’les arguments économiques profonds en faveur d’une très forte capacité de fabrication sont tout simplement une évidence et doivent être poursuivis.”
Il a plaidé pour que les capacités soient renforcées et a appelé à “un partage plus open source de la technologie, du savoir-faire, va être très important, en particulier dans les situations de pandémies et d’urgences mondiales”. « Les pandémies peuvent mettre les économies à genoux », a-t-il déclaré, expliquant que la résilience doit être l’une des grandes leçons à tirer de cette pandémie.
Mo Ibrahim, Fondateur et Président de la Fondation Mo Ibrahim, est intervenu pour dire que, selon lui, le refus de se faire vacciner est « un phénomène mondial – la défiance vaccinale n’a rien d’africain ». Il a souligné « nous avons tous été déçus également de la façon dont l’Europe a agi pour protéger sa propre industrie pharmaceutique” sur la question des droits de propriété intellectuelle.
Mo Ibrahim a ajouté que « nous, les Africains, avons commis des erreurs et nos systèmes de santé sont trop faibles. Nous dépensons 1,9 % du PIB dans nos systèmes de santé, bien en deçà de la moyenne mondiale et nos systèmes statistiques sont lacunaires.”
M. Urpilainen a rappelé que les dirigeants politiques devaient donner la priorité à leurs citoyens, et que l’UE avait fait preuve d’une « solidarité » exceptionnelle envers ses partenaires africains. « Beaucoup reste à faire, a-t-elle dit, et ce n’est qu’ensemble que nous pourrons concevoir des solutions durables pour nos deux continents. » En amont du 6eme Sommet UA/UE, la Fondation Afrique Europe partagera les principaux éléments de ces trois grands Débats – Energie/Climat ; Migrations/Mobilité ; Access aux vaccins et Autonomie sanitaire, de nature à nourrir les échanges entre Chefs d’état des deux continents.
A propos de la Fondation Afrique-Europe
La Fondation Afrique-Europe est une entité de consortium cofondée par les Amis de l’Europe (Friends of Europe), la Fondation Mo Ibrahim, en partenariat avec la Fondation Africaine pour le Climat (African Climate Foundation) et l’organisation ‘ONE campaign’. Elle rassemble une multitude d’acteurs, de la société civile aux entreprises, des politiques à la jeunesse, à travers l’Afrique et l’Europe. L’objectif de la Fondation Afrique-Europe est de faciliter des dialogues multipartites, de catalyser des partenariats et de débloquer de nouvelles opportunités qui peuvent contribuer à transformer les relations Afrique-Europe.